Trois affaires financières spéculatives défraient la chronique actuellement :
Le fonds américain Archegos Capital est contraint de liquider en urgence 20 milliards de dollars d'actions, car les banques auprès desquelles il s'était endetté pour spéculer ont refusé de continuer à lui faire crédit. Ces banques perdent des milliards de dollars dans l'opération. Archegos Capital gère la fortune amassée par Bill Hwang, son patron. Celui-ci avait investi sur la hausse de certaines valeurs, dont des géants chinois comme Baidu et Tencent, et des géants américains des télécommunications comme ViacomCBS et Discovery Inc. Or ces valeurs de la tech ont fortement baissé, l'action Baidu passant de 350 dollars fin février à 200 dollars lundi 29 mars. Avec un effet de levier de 5 fois la mise, le risque s'est révélé désastreux. Les banques impactées sont de grandes institutions comme la japonaise Nomura avec une perte de 2 milliards de dollars et une chute en bourse de 16 %, Crédit Suisse avec une perte non chiffrée mais une chute de 15 % en bourse, Deutsche Bank, des banques américaines (Goldman Sachs, Morgan Stanley, JP Morgan).
L’affaire GameStop (voir article ci-après).
Le scandale Wirecard qui éclabousse la réputation de la place financière allemande. Cette affaire de fraude concerne la société de paiement en ligne Wirecard, qui a dû reconnaître un trou de 1,9 milliards d'euros dans ses comptes, soit le quart de son bilan. Du coup, son action s'est effondrée (alors qu'elle faisait partie du prestigieux indice Dax depuis 2008), entraînant sa faillite. Cela a entaché la réputation du cabinet d'audit EY, celle de l'organisme de contrôle des cabinets d'audit, le renvoi du patron du gendarme financier allemand (Bafin) et l'inculpation de ses 85 salariés, qui ont spéculé sut l'action Wirecard. Un projet de loi va être déposé en fin d'année pour renforcer les règles de supervision comptable des entreprises allemandes.
Ces affaires confirment que, les règles prudentielles internationales instaurées par les actes de Bâle III, depuis la crise des subprimes de 2008, pour faire face à de nouvelles crises financières risquent d'être insuffisantes. Ces règles consistent en un renforcement des fonds propres des banques, conjointement au soutien des banques centrales (prêteuses en dernier ressort). Des stress tests sont régulièrement organisés pour vérifier la solidité et la stabilité des banques. La réalité risque de se montrer bien plus sévère.
Gamestop : les vendeurs à découvert mis à mal par des petits actionnaires
(Le Figaro 30 mars 2021)
Les fonds spéculatifs étaient au centre de l’affaire Gamestop, qui a ébranlé Wall Street en février 2021. Cette chaîne de distribution de jeux vidéo était dans le viseur des short-sellers. Pour ces fonds, qui spéculent à la baisse, elle semblait une cible idéale : une entreprise de petite taille opérant dans un secteur en perte de vitesse.
Mais la mécanique s’est enrayée. Les fonds ont trouvé face à eux une armée de particuliers qui se sont coordonnés sur les réseaux sociaux et ont massivement acheté des actions Gamestop par le biais de courtiers low-cost tel Robinhood (« Robin des bois »).
Les hedge funds ont été contraints de racheter leurs positions dans l’urgence et le cours de Gamestop s’est envolé. Les hedge funds piégés par la fronde des petits porteurs ont perdu des milliards de dollars !
Historique (Wikipédia 30 mars 2021)
GameStop (EB Games, anciennement Babbage's) est une entreprise spécialisée dans la distribution de jeux vidéo et de matériel électronique. Le siège de la société est situé à Grapevine, au Texas. En 2016, la société comptait 7 117 points de vente répartis dans le monde entier.
En octobre 2008, GameStop a racheté Micromania, alors premier revendeur de jeux vidéo en France.
En 2010, J. Paul Raines est désigné comme CEO.
En décembre 2018, GameStop annonce la vente de sa filiale Spring Mobile, qui possède notamment près de 1 300 magasins sous marque AT&T, à Prime Communications pour 770 millions de dollars.
En 2019, Gamestop connait les heures les plus sombres de son histoire puisque l'entreprise est criblée de dettes et ne parvient pas à retrouver un repreneur.
En octobre 2020, alors que Gamestop est toujours profondément endetté et ferme des magasins dans le monde, la chaîne accepte la proposition de partenariat pluriannuel de Microsoft.
En janvier 2021, le cours de l'action GameStop est sujet à une liquidation forcée des positions courtes massive sous l'impulsion du subredditWallStreetBets. Cela se produit peu de temps après une déclaration d'Andrew Left, directeur du fonds Citron Research, prévoyant que la valeur de l'action diminuerait. Celle-ci augmente en réalité de plus de 600 % le 26 janvier 2021 et sa forte volatilité entraîne l'arrêt du trading à plusieurs reprises. Un autre hedge fund, Melvin Capital, est contraint à demander 2,75 milliards de dollars à d'autres groupes privés pour couvrir ses pertes sur l'action GameStop. La presse francophone qualifie cette action d'« Affaire GameStop ».
Le 24janvier2021, un modérateur de WallStreetBets déclare qu'il n'y a « aucun effort organisé de la part de la modération pour promouvoir, conseiller ou recommander des actions ».
Après la clôture de l'action GameStop en hausse de 92,7 % le 26 janvier 2021, l'entrepreneur Elon Musk tweete un lien vers le subreddit, ce qui augmente encore l'effet de l'opération boursière. Cela a un effet sur le nombre d'abonnés de r/wallstreetbets, qui passe de 2,2 millions d'abonnés la veille à plus de 8 millions d'abonnés une semaine plus tard. Le 2février2021, le cours de l'action GameStop chute de 60 % à Wall Street.
L'affaire GameStop (Midi Libre 30 mars 2021)
L'affaire GameStop n'est pas si complexe qu'il n'y paraît. Elle remet en cause les hedge funds, ces fonds spéculatifs décriés par les boursicoteurs du web.
L'affaire GameStop secoue Wall Street depuis quelques jours. On vous explique les dessous de ce couac géant qui perturbe de nombreux économistes américains.
GameStop : un cours originairement menacé
Aux Etats-Unis, la bourse s'est ouverte depuis quelques mois aux petits investisseurs. Depuis le début de la crise du Covid-19, de nombreuses actions ont baissé, permettant une entrée dans le monde de la bourse à faible investissement. Ainsi, des étudiants, salariés ou encore retraités se sont laissé tenter.
Depuis, beaucoup d'Américains utilisent l'application Robinhood, pour acheter et vendre des actions. Un des utilisateurs de l'application a voulu miser sur l'action de GameStop. GameStop est une chaîne de magasins spécialisée dans les jeux vidéo et maison mère de la société française MicroMania. Or, quelques jours auparavant un groupe de "hedge funds" (des fonds spéculatifs) pariait sur une baisse des actions de l'enseigne.
L'action en hausse de plus 1 400 % (un américain anonyme appelle à acheter massivement cette action dans un forum communautaire du Web)
Trouvant le cours de l'action sous-côté et révolté par les décisions des hedge funds, cet américain, utilisateur de l'application Robinhood, décide de renverser le jeu. Pour parvenir à ses fins, l'homme incite les utilisateurs d'un forum communautaire de Reddit spécialisé dans la bourse à acheter en masse des actions de GameStop.
Les usagers du forum répondent à cet appel, et le cours des actions de l'entreprise flambe avec une hausse de 1 400 %. Comme le rappelle RTL, une augmentation d'une telle ampleur ne se produit pas souvent à Wall Street.
Des milliards de dollars perdus
Depuis cette augmentation massive, les grands fonds spéculatifs perdent plusieurs milliards de dollars. Sur le forum Reddit plusieurs utilisateurs se vantent d'avoir gagné des milliers d'euros pensant avoir "hacké" Wall Street.
Rapidement, l'application Robinhood a stoppé la vente d'actions de GameStop dénonçant un cours trop "volatil".
Cette revanche temporaire des petits investisseurs sur les gros démontre qu'aucun acteur économique n'est intouchable, pas même les grands "hedge funds".
Mais cette action communautaire se limite à la complexité du système. "Les membres du forum WallStreetBets ont fait mettre un genou à terre à des élites de Wall Street, c’est assez drôle, mais cela va rentrer dans l’ordre [...] À terme, la force du marché est plus grande que toute tentative de manipulation", estime Ramon de Oliveira, président du conseil de surveillance d’Equitable et AllianceBernstein, cité par Le Monde.
Peu probable en France
Aujourd'hui, la bulle spéculative autour de GameStop est percée. Le cours de l'action était en recul de 60 % mardi 2 février, démontrant le caractère temporaire de cette révolte.
Les experts estiment qu'une action de masse de ce type à la française n'est pas possible pour le moment, en raison notamment du manque de culture boursière de la population. "Ce qui s’est passé avec GameStop nécessite des compétences financières particulières comme la maîtrise de la notion d’effet de levier", analyse Patrick Chotard, PDG de Lynceus Partners, cité par Le Monde.
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